L’Association Monégasque des Activités Financières (AMAF) est au coeur de la dynamique économique de la Principauté. Élément essentiel aux évolutions et développement de la Place Financière, elle en fédère toutes les institutions et sociétés.
Entretien avec Etienne Franzi, Président de l’AMAF
Quels sont aujourd’hui les atouts de la place financière monégasque ?
Les atouts, institutionnels et humains, sont nombreux. Bénéficiant de la stabilité des institutions de la Principauté, la Place est totalement intégrée au modèle monégasque, qui se fonde sur la sécurité des personnes et des biens. C’est un fait, lorsque l’on évoque Monaco à l’étranger, l’un des premiers mots qui jaillit est « sécurité ». Sécurité pour le bien-être de tous, qu’il s’agisse des Monégasques eux-mêmes, des résidents ou des touristes. Il va de soi que cette attention particulière portée à la sécurité s’applique à la Place financière. Nous disposons ainsi d’organes de régulation de grande qualité. Grâce aux multiples accords franco-monégasques, toutes les activités bancaires sont supervisées par l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR). les banques monégasques sont ainsi soumises aux mêmes règles prudentielles et de surveillance que les banques françaises. Les activités de gestion sont, quant à elles, contrôlées par la Commission monégasque de Contrôle des Activités Financières (CCAF), qui bénéficie du concours de hauts responsables de l’Autorité des Marchés Financiers (A.M.F.). De même, dans la Principauté, tout établissement financier ou société de gestion doit impérativement être membre de l’Association Monégasque des Activités Financières (AMAF).
L’un des autres atouts incontestables de la Place financière monégasque provient aussi de la solidité des institutions qui la constituent. De fait, ces établissements sont l’émanation de grands groupes étrangers, français, suisses, britanniques ou encore italiens. Il n’existe pas d’établissement strictement monégasque. Les banques établies à Monaco sont toutes des filiales ou succursales, dirigées par des professionnels de haut niveau, avec une grande expérience internationale.
Ainsi, la Place financière monégasque est saine et prospère. Elle crée de la richesse. Le total de ses ressources a triplé en 15 ans.
Quelles en ont été les grandes évolutions ces dernières années ?
Je citerai 3 évolutions majeures.
L’AMAF compte aujourd’hui près d’une centaine de membres, soit une quarantaine de banques et quelque 60 sociétés de gestion de portefeuille et de fonds. La première évolution procède de la diversification en une décennie du profil de nos membres.
Ainsi, durant cette période, nous avons vu doubler le nombre de sociétés de gestion, passées de 30 à 60, par l’adaptation des textes régissant ce type d’activités.
La deuxième évolution porte la marque d’une seconde diversification, celle, voulue, de notre clientèle. De fait, d’importants efforts ont été consentis afin de l’élargir au-delà de l’Union Européenne, à l’ensemble de l’Europe, au Moyen-Orient, l’Amérique latine ou encore l’Afrique.
La troisième évolution correspond à l’un de mes principaux objectifs, en lien direct avec cette quête continue de l’excellence, caractéristique du modèle monégasque. Je souhaitais qu’il soit définitivement acquis qu’à Monaco, la qualification de nos collaborateurs n’avait rien à envier aux places concurrentes. J’ai donc initié la mise en oeuvre d’un dispositif de certification professionnelle avec le soutien de M. Jean Castellini et le plein accord de la Commission de Contrôle des Activités Financières (CCAF). Ce dispositif a été introduit dans notre réglementation en mai 2014, le rendant obligatoire.
Dès lors, tout collaborateur du « Front », en relation directe avec la clientèle ou les marchés, ainsi que leurs responsables directs, doit désormais être, impérativement, titulaire de ce certificat.
Comment se déroulent ces formations ?
Il s’agit d’une formation de 44 heures, dispensée par l’International University of Monaco (IUM), en collaboration, jusqu’à présent, avec IntellEval Monaco, centre de compétences et d’expertise en matière de Compliance. 16 heures sont consacrées à la déontologie. Les 28 heures restantes s’organisent autour d’un enseignement technique qui porte sur les outils financiers spécifiques ou encore, la macro-économie. La formation s’achève par un examen, sanctionné par un diplôme. La première session a débuté en 2014. A raison de deux par an, nous en sommes aujourd’hui à la septième promotion.
Quel bilan en faites-vous ?
L’opportunité d’un tel dispositif, unanimement reconnu comme une formation d’excellence, est maintenant devenue une évidence pour tous, employés et employeurs.
De nombreux accords de coopération dans le domaine prudentiel, dans la supervision des activités financières, dans la lutte contre le blanchiment ont été conclus. La Place financière monégasque fait-elle aujourd’hui figure de modèle ?
La Principauté constitue une caisse de résonance. Tout ce qui s’y passe est très largement commenté bien au-delà de ses frontières. Aucun manquement ne lui est permis. Il nous faut donc être exemplaire.
La qualité de nos Autorités de Régulation et de nos Maisons apporte toutes assurances dans le domaine prudentiel.
La lutte contre le blanchiment d’argent est un autre point essentiel lorsque l’on vise l’excellence et que l’on est guidé par des valeurs éthiques, qui ne sauraient tolérer de tels agissements.
Il existe, dans ce domaine, une coopération très étroite et continue entre les services de l’administration et les professionnels que nous sommes.
Cela va de pair avec l’attractivité d’une place financière pour des clients exigeants. Confidentialité et lutte contre le blanchiment sont compatibles. Nos banques sont tenues de parfaitement connaître leurs clients, leur background et l’origine de leurs capitaux. Parallèlement, nos personnels sont soumis au secret professionnel qui garantit la sphère privée de la clientèle.
L’AMAF se préoccupe de ces questions depuis de très nombreuses années, notamment par l’édition de recommandations professionnelles précisant les obligations et diligences de ses membres en matière d’identification et de connaissance des clients, ainsi que pour la surveillance des mouvements de capitaux.
Bien entendu, le secret professionnel n’est pas opposable aux organismes de régulation et de lutte contre le blanchiment, eux-mêmes soumis au secret professionnel, ni aux autorités judiciaires, agissant dans le cadre d’une procédure pénale.
Il ne peut non plus s’opposer à la mise en oeuvre des accords d’échange d’informations passés par la Principauté.
Au demeurant, l’une des directives données par S.A.S. le Prince Souverain dès son avènement a été que la Place devait êrtre à la pointe de la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme. C’est un combat qui est mené de longue date et, du reste, la Principauté est régulièrement évaluée par tous les organismes internationaux compétents, qu’il s’agisse du G.A.F.I. (Groupe d’Action Financière sur le blanchiment de capitaux), de MONEYVAL (Conseil de l’Europe) ou du F.M.I. (Fonds Monétaire International). Pour ce faire, les moyens humains et matériels de notre financial Intelligence Unit ; le SICCFIN (Service d’Information et de Contrôle sur les Circuits Financiers) ont été considérablement renforcés tout au long de ces dernières années.
La Place financière monégasque vise l’excellence dans tous les domaines, qu’ils soient humains ou institutionnels, qu’il s’agisse de sécurité, d’éthique, de stabilité, de solidité ou encore de qualité de services. Par là même, sans prétendre être un modèle, je dirais, en paraphrasant Talleyrand, qu’ « en nous comparant, nous nous rassurons ».
La Principauté est-elle une Place financière internationale ?
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Aujourd’hui, la moitié des ressources de la Place provient d’une clientèle non-résidente. De la même façon, nos collaborateurs viennent d’horizons et de pays multiples. Elle participe à des organisations européennes, avec qui elle n’a de cesse d’échanger, est membre associé de la Fédération Bancaire Européenne qui rassemble les Associations Bancaires de l’Union Européenne et de l’Association Européenne de Libre Echange (A.E.L.E.) et est notamment membre fondateur de l’Union Bancaire Francophone, créée en septembre 2012 – qui regroupe 16 Associations bancaires de Pays francophones.
Quels facteurs seraient susceptibles de développer davantage encore son attractivité ? Quels sont les défis des prochaines années ?
Nous avons d’ores et déjà amorcé les orientations majeures qui vont constituer, dans les années à venir, les lignes de force de notre place, pôle de croissance important pour la Principauté.
Ainsi en est-il du renforcement continu de son caractère international, pour lequel nous menons une politique volontariste d’élargissement de son « rayon d’action ». Dans cette perspective, certains projets de développement d’infrastructures en cours, tel celui de la plateforme aéroportuaire de Nice, à même de « rapprocher » le monde de la Principauté, constitueraient de réels atouts.
Parallèlement, la professionnalisation, facteur important de notre attractivité et de notre rayonnement, sera poursuivie et renforcée.
Il est également indispensable d’adapter, d’améliorer et de moderniser sans cesse les textes encadrant nos activités. Sur ces sujets, nous travaillons main dans la main avec nos Autorités de tutelle.
L’un de nos plus grands défis demeure néanmoins de communiquer davantage sur les réalités de la Place, sa régulation, sa dynamique économique et son sérieux, ce que nous faisons de concert avec le Monaco Economic Board (MEB) afin de lutter contre les clichés éculés qui, malgré nos efforts, nous « poursuivent » encore.