Stéphane VALERI, Conseiller de Gouvernement-Ministre des Affaires Sociales et de la Santé : Le Télétravail, une opportunité pour Monaco.
1) Quelles problématiques ont été à l'origine de la nouvelle législation sur le télétravail à Monaco ? L'impact sur les retraites peut-il être important ?
Le développement du télétravail constitue l'un des facteurs majeurs pouvant permettre à la Principauté d'affermir son rôle de pôle de développement économique, au plus grand bénéfice, également, des territoires français limitrophes et voisins.
Il constitue une réponse appropriée à l’exiguïté du territoire et au coût de l’immobilier, pouvant freiner le développement économique : autant d’éléments qui me font dire que le télétravail est bien un enjeu essentiel pour l’avenir de la Principauté.
Mais pour cela, il fallait au préalable que les négociations avec la France, entamées en 2010, permettent de modifier les règles conventionnelles en matière d’affiliation des futurs télétravailleurs à un régime de sécurité sociale.
En effet, l’intérêt de développer le télétravail pour les entreprises et pour les salariés de la Principauté, était subordonné à l’accord des Autorités françaises pour que les futurs télétravailleurs soient affiliés aux régimes sociaux monégasques, en lieu et place des régimes sociaux de leur Etat de résidence, en l’occurrence la France.
L’impact sera donc très positif pour la Principauté.
Les employeurs pourront développer leur chiffre d’affaires et leurs bénéfices. L’Etat bénéficiera de nouvelles recettes de TVA et d’impôt sur les bénéfices.
De plus, grâce aux emplois ainsi créées, la Caisse de Compensation des Services Sociaux et la Caisse Autonome des Retraites profiteront de cotisations nouvelles pendant toute la durée d’activité des télétravailleurs, qui contribueront au financement et à l’équilibre du régime.
Et nous savons que ceci est particulièrement nécessaire pour l’équilibre du régime de retraite des salariés.
Le télétravail constitue une belle avancée, qui place notre pays et son économie sur le chemin de la modernité, de la croissance de l’emploi et des heures travaillées.
Le télétravail c’est l’avenir et nous nous devions d’être au rendez-vous. Nous y sommes et j’ai confiance dans les salariés et les employeurs pour le comprendre. A eux désormais de l’utiliser.
2) Comment a-t-on évalué le nombre d'emplois que le télétravail va possiblement générer, et sur combien d'années ? (on a parlé de 8000 emplois nouveaux ? Connait-on les secteurs d'activité concernés ? Se base-t-on sur la moyenne européenne de télétravail entre 15% et 20% ?)
En Europe, la moyenne des salariés télétravailleurs oscille entre 15 et 20 % : si l’on reporte ces chiffres sur la Principauté de Monaco, cela représenterait environ entre 7000 et 10 000 emplois, à moyen terme, car il faudra, bien évidemment, plusieurs années pour que cette nouvelle forme de travail monte en puissance.
Il ne s’agit cependant pas uniquement de création d’emplois : des salariés actuels pourront choisir, en accord avec leur employeur, ce nouveau mode d’organisation et il s’agira alors de transformation de postes.
Tous les secteurs d’activité pourraient être concernés : même l’hôtellerie et les entreprises du secteur industriel, par exemple, pourraient recourir au télétravail, pour le secrétariat ou certaines tâches administratives. Mais, bien évidemment, les nouvelles technologies, l’informatique, la communication, le secteur bancaire et plus largement les sociétés de service, sont les domaines les plus concernés.
3) Concrètement, comment les entreprises s'y prendront-elles ?
Nous visons à la simplicité et à l’efficacité.
Ainsi, dans le souci de faciliter l’introduction de cette nouvelle forme de travail, des moyens concrets et pratiques sont mis à la disposition des employeurs à la Direction des Travail :
- des modèles de contrat de travail ou d’avenant au contrat de travail peuvent être remis, en mains propres, aux personnes intéressés,
- ainsi qu’un formulaire qui servira de support aux employeurs pour rédiger le « Dispositif cadre » présentant les modalités générales d’exécution d’une activité en télétravail.
Enfin, une brochure à destination aussi bien des salariés que des employeurs a été finalisée. Elle sera adressée personnellement, à chaque chef d’entreprise, par la voie postale, dans les prochains jours.
La Direction du Travail se rend également disponible pour recevoir chaque employeur qui en ferait la demande, toujours dans le but de faciliter la mise en œuvre pratique du télétravail.
4) Souhaitez-vous parler de l'exemple de la Caisse d'Epargne CAZ ?
La Caisse d’Epargne dispose effectivement d’une solide expérience en matière de télétravail, acquise, en France, pendant plus d’un an.
M. Moreau, membre du Directoire de la Caisse d’Epargne Côte d’Azur, en charge du pôle Ressources, a indiqué lors d’un petit-déjeuner organisé, le 5 juillet dernier, par le Monaco Economic Board que ce test s’est révélé particulièrement concluant et qu’il devrait être reconduit et étendu à Monaco.
Plus largement, de récentes études démontrent qu’en France, de plus en plus d’établissements bancaires (récemment Natixis, le Crédit Agricole ou encore la Société Générale) font évoluer leur management, en introduisant progressivement, avec succès, le télétravail, notamment s’agissant des services de back-office, de l’informatique ou encore des ressources humaines.
A Monaco, c’est Monaco Telecom qui a ouvert la voie, avec 43 télétravailleurs depuis le 1er septembre et l’entreprise table sur 80 salariés en télétravail d’ici la fin de l’année.
En France, dans les entreprises qui ont mis en œuvre le télétravail, on estime globalement à 96% le taux de satisfaction liée au télétravail de toutes les parties prenantes (télétravailleurs, managers et employeurs), compte tenu des gains moyens de productivité (+22%), de temps gagné au profit de la vie familiale par jour de télétravail (37mn) et de temps moyen de sommeil supplémentaire par jour de télétravail (45mn).
Ces chiffres laissent à penser que de nombreuses entreprises monégasques souhaiteront tenter l’expérience.