ICO et crypto-monnaies au regard de la TVA : analyse fiscale comparative

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L’ICO révolutionne la levée de fonds traditionnelle, mais reste encore soumise à une insécurité juridique et fiscale. Face à l’absence de qualification juridique du token, nécessaire à la matière fiscale, notamment pour l’assujettissement à la TVA, l’enjeu est de déterminer si les tokens sont assimilables à de la monnaie, à des valeurs mobilières ou s’il s’agit de livraisons de biens ou de prestations de services.

Dans une décision du 22 octobre 2015, la CJUE a défini le Bitcoin comme un moyen de paiement. L’échange de Bitcoin contre de la monnaie-fiat peut rentrer dans le champ d’application de l’exonération de TVA prévu à l’article 135 de la directive TVA 2006/112/CE. L’échange de jetons au titre d’une ICO contre d’autres crypto-monnaies ou devises fiduciaires pourrait être également considéré comme une opération exonérée en vertu de la même directive. Singapour semble adopter une position inverse, considérant la crypto-monnaie ou l’émission de tokens comme une prestation de service assujettie à la TVA. 

Concernant les « tokens utility », la TVA doit forcément être exigible. La question est de savoir à quel instant la TVA afférente à l’opération économique sera exigible ? La réponse est assez simple mais nécessite d’être tranchée : au début ou à la fin. La TVA peut être dûe lors de l’émission du token, sur une valeur déterminée en se basant sur une monnaie-fiat, ou lors de l’exercice du droit lié au token et donc au moment de la transformation du token en livraison de biens ou prestations de services, dont la valeur sera appréciée sur une crypto-monnaie après une éventuelle spéculation, ce qui pourrait poser des difficultés. 

L’ICO peut aussi générer des « investment tokens » qui, eux, seront probablement assimilés à des titres financiers. C’est d’ailleurs la position qui a été retenue par les USA. La qualification de security a été retenue par la Securities and Exchange Commission (SEC) le 25 juillet 2017 dans le cadre de l’ICO « The DAO ». La SEC s’est fondée sur la définition de securities de droit américain, sur la base du Securities Act 1933, en relevant que les tokens considérés devaient être qualifiés de securities. Cette position induit à écarter les problématiques de TVA dans la mesure où les securities ne peuvent être imposés de fiscalité indirecte.

Pour résumé, l’assujettissement des tokens à la TVA semble principalement s’appliquer à partir du moment où des prestations de services ou des livraisons de biens leurs sont attachées. Ainsi, la détermination du régime de TVA applicable en matière de token nécessite une analyse casuistique de leur nature. 

L’environnement mondial des monnaies digitales a évolué en 2017, notamment grâce au Japon et à l’Australie qui ont reconnu les crypto-monnaies comme moyen de paiement légal et dont les opérations sur les marchés de crypto-monnaies sont exonérées de fiscalité indirecte. Inversement, Singapour, à travers l’IRAS, semble mettre en place une TVA exigible sur l’émission ou la vente de crypto- monnaie. L’administration fiscale israélienne a proposé, quant à elle,  de soumettre les ICO à une taxe sur la valeur ajoutée en dissociant les opérations de ventes et les opérations de services. L’Australian Securities and Investments Commission a une approche singulière qui nous semble pertinente. Elle considère que le statut légal des ICO dépend de leur circonstance, de leur structure et de leur mode opératoire, ainsi que des droits attachés au token vendu.  Ainsi, la détermination du régime de TVA applicable en matière de token nécessite une analyse casuistique de leur nature, ce qui semblerait être la solution la plus efficace.