Les déjeuners de l’AMAF (Association Monégasque des Activités Financières) ont accueilli, le 6 novembre dernier, Monsieur Laurent Anselmi, Directeur des Services Judiciaires, pour une conférence sur la criminalité financière.
Après avoir souligné la difficulté à définir le périmètre de la criminalité financière (mouvements internationaux de capitaux, détournements de fonds, infractions en matière d’appels d’offres…), M. Anselmi soulignait le caractère variable de sa finalité, les actions illégales pouvant être commises dans un but purement lucratif, ou pouvant constituer un moyen de financer, par exemple, une activité terroriste.
Il rappelait que si la Principauté dispose d’instruments classiques pour lutter contre la criminalité financière, résultant notamment du code pénal comme, par exemple, l’escroquerie, les dernières décennies ont connu d’importantes évolutions :
- Tout d’abord, le Prince Rainier III a mené une politique volontariste pour structurer la législation en droit public économique, avec un volet financier et pénal conséquent.
- Ont ainsi été promulguées :
- la loi du 8 janvier 90 relative aux fonds communs de placement ;
- la loi du 26 juillet 91 concernant l’exercice de certaines activités économiques et juridiques ;
- la loi du 7 juillet 93 portant création au Code pénal d'une infraction de blanchiment et modifiant le Code de procédure pénale ;
- la loi du 9 juillet 97 relative à la gestion de portefeuilles et aux activités boursières Assimilées.
- Le Prince Albert II a ensuite souhaité organiser la vigilance normative à l’égard de la criminalité financière en mettant tout particulièrement l’accent sur la problématique du blanchiment, par une première loi en date du 3 août 2009 relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la corruption puis une seconde en date du 28 juin 2018 renforçant ce dispositif dans le sillage de directives européennes. Ont ainsi été traitées le régime de la déclaration de soupçon, de la confidentialité des informations et celui des « lanceurs d’alerte ».
M. Anselmi relevait également que cette évolution législative a affecté le paysage administratif et institutionnel du pays :
- d’une part en entrainant, la création d’une autorité administrative indépendante : la Commission de Contrôle des Activités Financières (C.C.A.F.) chargée de la supervision des activités financières de la place, laquelle avait été précédée par celle de la Commission de Contrôle des Informations Nominatives (C.C.I.N.)
- d’autre part, en favorisant l’émergence d’une cellule de renseignement financier aux compétences progressivement renforcées : le Service d’Information et de Contrôle sur les Circuits Financiers (S.I.C.C.F.I.N.), chargé de recueillir, d’analyser et de transmettre, le cas échéant à l’autorité judiciaire, les informations en lien avec la lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la corruption.
Quant à la répression de la criminalité financière, le conférencier observait la dualité de la nature juridique des sanctions possibles qui peuvent être d’ordre administratif ou pénal.
Sur le plan statistique, il indiquait qu’à Monaco, 41 % des affaires pénales concernent des infractions économiques et financières.
En conclusion, M. Anselmi insistait sur la perpétuelle évolution de ce type de criminalité justifiant que les autorités administratives et judiciaires de la Principauté puissent disposer d’instruments juridiques permettant une adaptation constante aux pratiques illicites. A cette fin, il a annoncé une coopération avec la Faculté de Droit de Nice en vue d’une recherche approfondie sur la criminalité financière et le droit monégasque.