Les lois n° 1.449 et 1.550 respectivement du 14 juillet et 10 août 2023 dans le domaine de la lutte contre le blanchiment, s’appliquant à la fois aux sociétés, fondations et associations, ont créé de nouvelles missions dont les contours restent encore à définir par l’adoption d’ordonnances souveraines.
D’ores et déjà, il est intéressant de noter que de nouvelles missions apparaissent et qu’une dynamique de contrôle se met en place, dès le stade de la création mais aussi en continu, lors de toute modification et jusqu’à la liquidation des entités juridiques et des sociétés, permettant aux autorités d’avoir une connaissance précise de l’évolution des professionnels.
La loi n° 1.550 a créé une nouvelle catégorie d’« acteurs » en charge de la collecte, la transmission à de multiples autorités nationales, et la conservation d’informations élémentaires essentielles au regard de la personne morale et de la personne individuelle, (dirigeant effectif, bénéficiaire effectif, actionnaire, associé) pendant une durée élargie à dix ans. Ce « responsable des informations élémentaires » peut également avoir la charge de collecter les informations sur les bénéficiaires effectifs d’une entité. La personne choisie est une personne physique ou morale, désignée en interne ou en externe. En interne, les dirigeants et le conseil d’administration voient leur responsabilité s’accroître et doivent justifier des différentes missions sur les informations élémentaires, les déclarations des bénéficiaires effectifs. En externe, les professionnels pouvant assumer cette collecte sont : avocat, notaire, Multi Family Office, conseiller juridique, économique ou fiscal, expert-comptable (ou commissaire aux comptes), ou encore Corporate Service Provider. Il s’agit bien d’un « responsable » qui peut aussi assumer d’autres fonctions visées dans les mêmes lois ou dans d’autres lois. On peut ainsi envisager en interne un Compliance Officer, également responsable de la collecte des informations élémentaires, responsable des alertes, référent au titre de la législation sur le harcèlement, et peut être aussi Data Protection Officer selon les dispositions de la législation relative à la protection des données (contenue dans la loi n° 1.165 du 23 décembre 1993 modifiée qui devrait évoluer prochainement).
Qui dit responsabilité dit une gouvernance approfondie des organes de direction, du conseil d’administration, voire d’un groupe sur toutes ces désignations et nouvelles missions. Plus encore, responsabilité dit assurance et la couverture assurantielle tant des individus que des personnes morales devrait s’élargir à l’avenir ; la notion de responsabilité est reprise dans différents textes. La responsabilité est à la fois professionnelle, civile, administrative et pénale. Les responsabilités des acteurs renforcent les contrôles par des organes tant administratifs que judiciaires qui se voient dotés de nouvelles missions de vérification, de sanction, de contrôle des registres et des contestations ; ces dernières missions étant confiées au Tribunal de Première Instance.
Quelles conséquences pratiques de la création d’une nouvelle catégorie juridique d’acteurs ?
Les sanctions peuvent être prononcées tant par la nouvelle autorité administrative indépendante l’Autorité Monégasque de Sécurité Financière, que par la Direction du Développement Économique et le Département de l’Intérieur (jusqu’à 100.000 EUR).
À côté de ces nouvelles fonctions, (en charge des informations élémentaires, référent interne pour les alertes), des acteurs déjà existants voient leurs missions et responsabilités élargies. Outre le Compliance Officer ou le Responsable Conformité, il en va aussi des liquidateurs de sociétés commerciales ou civiles implantées en Principauté de Monaco. Ces liquidateurs peuvent être sanctionnés pénalement (six mois d’emprisonnement et une peine d’amende de 18.000 EUR à 90.000 EUR) s’ils ne conservent pas de manière appropriée les informations dont ils ont la charge dans le cadre de la liquidation.
Une nouvelle dynamique de responsabilité s’est donc créée sur la création, modification, cessation d’une activité en Principauté en créant de nouvelles fonctions, tirée par cette volonté d’accroître les moyens de lutte contre la fraude.
L’organisation interne d’une société, son contrôle, et en premier lieu par ses propres instances dirigeantes, sont devenues les critères essentiels de l’implantation d’une activité en Principauté, notamment lorsque cette activité est assujettie au dispositif lutte anti blanchiment. Les moyens techniques et humains sont renforcés. L’intérêt légitime d’une organisation doit être prouvé. De grandes évolutions à venir seront précisées par les textes d’application.